Ecrit par Marie Vingtras et publié en 2021, Blizzard est un roman à suspens, comparable à un thriller en cinéma. Le début n’est pas très clair, puis le scénario se construit, se reconstruit tout au long de l'oeuvre.
A partir de la disparition d’un enfant, Thomas, perdu dans une tempête de neige, alors qu'il était accompagné de Bess, on découvre peu à peu de nouveaux personnages (Benedict, Cole, Freeman et Clifford), qui racontent sous forme de petits chapitres, leur vie et leur histoire. Ces personnages nous permettent d’avancer dans le scénario et de nous demander où est Thomas, pourquoi Bess et lui sont-ils sortis par un tel blizzard ; bien d'autres questions encore. Cette œuvre est aussi l'occasion de parler de problèmes graves, qui nous paraissent tellement graves que l’on ne pense pas être concernés. On y parle de violences, de violences choquantes, de la violence physique à laquelle chaque personnage se trouve confronté. On y parle également de problèmes sociaux (la mort de proches, la peur et la maltraitance). Le livre fait aussi une grande place au sexisme qui est incarné de manière terrifiante et très bouleversante par les personnages de Cole et Clifford et c’est ce qu’il m’a le plus choqué en tant que lecteur. Rarement, dans des œuvres la violence est montrée du point de vue du criminel. Or, ici, le fait qu’on sache la pensée de Clifford, par exemple, traduit de manière forte ce qui est ou va être vécu par la victime. Cole dit des choses violentes et terribles ; il parle de viol comme si cela n’avait rien de grave ou de malsain. Il dit par exemple parlant de Clifford : « Ça le démangeait de lui rendre une petite visite […] pour lui montrer deux trois trucs qu’on peut faire avec une fille quand on est un homme. » (p.125) et pour continuer Cole déclare :« Je lui ai dit de ne pas se priver pour moi, qu’il avait ma bénédiction » (p.125). Cette banalisation répugnante dans l'évocation des faits nous indigne contre ce personnage. C'est pourtant intéressant d'avoir la parole de Cole, preuve de l’originalité de ce roman. .
Blizzard, c’est le titre du livre , mais aussi la situation de la première scène qui entraîne la suite de l’histoire. Cette première scène engage le lecteur à se questionner sur cette disparition de Thomas et le pousse à continuer impatiemment le roman pour en savoir plus. C'est un choix d'amorce typique des œuvres de suspens (une énigme dès la première page) qui m’a d’ailleurs particulièrement plu. La fin est l’éclaircissement total cette énigme posée au commencement du livre. L’enfant est retrouvé, les problèmes avec les personnages de Cole et Clifford sont réglés, et tout se termine par la parole de Freeman, l’ancien soldat. Il y a beaucoup à retenir dans ce livre (comment l'intrigue va relier l'histoire des personnages, l'organisation des chapitres etc.). Mais, ce qui a le plus retenu mon attention est la dimension complexe des personnages. Chacun possède une humanité différente (de la compassion à la violence) qui le rend attachant ou pas. Freeman est un bon exemple de cette humanité, et il est d’ailleurs mon favori. Freeman est un homme complexe, mais qui laisse des questions et des surprises sur sa façon d’être . On découvre peu à peu les facettes de cet attachant personnage (un vieil homme fort, mais mystérieux et tourmenté). Son histoire devient intéressante lorsque l’on apprend les souffrances mentales qu’il a vécues et les souffrances physiques atroces (ses camarades tués au combat). Au retour de son engagement dans l'armée, il trouve une femme avec qui il a un enfant. Les tourments laissent place à la joie ; il semble peu à peu se rétablir de ses souffrances. Mais un nouveau malheur le frappe, qui en fait le surprenant assassin de son fils. Avec cet évènement et son passé, on arrive à différencier les criminels véritables, et ceux que la vie a bouleversés. Car, malgré ce meurtre, il reste un homme bon et attachant.
Ce livre m’a beaucoup plu dans sa complexité bien organisée. Mais c’est surtout un roman intéressant par la vision qu'il donne de l’humanité et de l’Homme. Les personnages ont un sens ; ils sont tellement bien construits qu'ils en paraissent presque réels.